Module n°2

Dans ce module, intéressons-nous à la manière de créer un potager qui soit à la fois pratique pour vous, et favorable au développement de la biodiversité.

Le mot d'ordre est : résilience de l'écosystème !

Bonne lecture !


Module n°2 : créer un lieu propice à ses habitants

Intégrer son potager dans son terrain

Dans le précédent module, nous avons rapidement mentionné l'importance de bien réfléchir à l'emplacement de votre potager pour qu'il s'inscrive au mieux dans vos habitudes de vie, ainsi qu'aux objectifs auxquels il devait répondre. Cette réflexion porte un nom : le design en permaculture.

Bien que les résultats de cette réflexion diffèrent selon les personnes, il existe plusieurs outils permettant de mener à bien cette réflexion. Parmi eux, le principe de zonage permet de déterminer l'emplacement de votre potager.

Ce zonage est pertinent si vous disposez d'un grand terrain. Si ce n'est pas le cas, les solutions qui s'offrent à vous se révéleront de manière plus évidente. Néanmoins, vous pouvez tout de même vous inspirer des principes qui suivent !

Le principe de zonage consiste donc à organiser son terrain de la zone 0 étant généralement la maison, jusqu'à la zone 5, zone laissée à la nature sauvage.

Ces zones sont organisées en fonction de la fréquence des actions et des visites nécessaires : de la zone 0 et 1, les zones les plus visitées, à la zone 5, la moins visitée.

Vous allez visiter plusieurs fois par semaine votre potager, tandis que la zone laissée à la nature sauvage ne sera visitée que pour l'observer, peut-être une fois par mois (ou plus si vous aimez ça !).

Proche de votre lieu d'habitation, vous pourrez facilement aller cultiver, récolter, observer... On peut même se servir des microclimats créés par la maison pour cultiver des plantes : aux pieds des murs, la chaleur est plus intense et moins variable entre le jour et la nuit. Les cultures primeurs y réussissent mieux, notamment si l'on peut se construire un châssis.

On peut également imaginer créer une serre adossée à un mur de la maison, ou encore une véranda, etc.

Ainsi, il est pertinent d'installer son potager dans la zone 1, voire 2 de son terrain.

Chercher l'ergonomie et l'interconnexion des éléments

Réfléchir aux différents éléments du jardin et comment les disposer est primordial pour créer un potager permacole. L'ergonomie, la simplicité d'utilisation et la pertinence de chaque élément doivent être réfléchies.

Voici quelques exemples, n'hésitez pas à nous en suggérer d'autres dans les commentaires, cette formation est aussi collaborative, rien ne vaut l'intelligence collective !

  • Prenons l'exemple de la tonte, et de l'entretien des bords de terrain. Si vous le pouvez, laissez des espaces entre les premiers éléments du potager et le bord du terrain. Cela vous permettra de passer derrière et de pouvoir tondre, entretenir à la main, sans acrobaties.

    Si votre potager est installé en lisière de forêt par exemple, des ronces vont sans cesse chercher à venir s'installer sur les planches. Si vous laissez une bande d'1 mètre avant la première planche de culture, vous pourrez facilement accéder, et calmer l'ardeur des ronces.

    Laissez donc cet espace entre vos différents éléments : 1 m derrière la cabane de jardin, la cuve d'eau...

    Nous avons fait cette erreur dans notre potager et nous le regrettons, car certaines invasives comme le raisin d'Amérique cherchent à s'installer dans ces zones non entretenues, et c'est un vrai casse-tête pour s'en occuper.

    Nous avons nettoyé cet hiver et trouvé une racine de raisin d'Amérique de la taille d'un petit ballon de rugby dans la serre. Le pied poussait juste dehors, sur le côté de la serre, dans la zone "inaccessible", et au même niveau que deux pieds de tomates qui étaient restés rachitiques toute la saison. Nous avions alors compris pourquoi !

Vous gagnerez, en procédant ainsi, énormément de temps en entretien. N'oubliez pas que le potager, et plus généralement le biotope d'une prairie, est une étape instable du processus de succession écologique : les écosystèmes en climats tempérés cherchent sans cesse à évoluer vers la forêt, vous aurez donc toute votre vie des végétaux dits pionniers (qui préparent le terrain pour la future forêt), qui chercheront à s'installer dans votre jardin. C'est naturel ! Observez un terrain en friche durant 30 ans et vous verrez une succession naturelle de différentes plantes, allant des annuelles les premières années jusqu'aux chênes et autres grands arbres à la fin.
Pour plus d'informations sur ce phénomène, visitez cette page.

  • Autre exemple, le compost. Pour gagner du temps de déplacement, n'hésitez pas à installer le compost au milieu du potager ou à son entrée/sortie, surtout si la zone est assez grande. Cela vous permettra de gagner du temps lors de vos allers/retour pour y accéder. Si l'on cumule le temps passé à marcher jusqu'au compost sur une année, cela représente quelques heures tout de même ! Installez donc ce compost à un endroit stratégique, à la fois accessible et proche de tout !

On peut également le placer proche de la zone la plus productrice de déchets : la cuisine, ou autre encore... Mais nous trouvons plus pratique d'avoir un bac à compost dans la maison et aller le vider tous les 2/3 jours en passant au potager.

  • Même réflexion pour l'eau : si vous avez le choix, placez en la source à un endroit le plus pratique possible. Marcher 50 mètres pour allumer l'eau n'est pas des plus commode ! Nous en reparlerons dans un futur module, mais si votre terrain est en pente, l'eau est idéalement placée en amont du potager : cela permet de tirer de l'eau sans pompe.
  • Autre exemple encore, les arbres. Pensez à leur taille finale, dans 10/20 ans ans. Inutile de trop coller un cerisier au potager qui certes ne fera pas d'ombre les premières années, mais devra être taillé tous les ans au bout d'un certain nombre d'années. C'est dommage, c'est de l'entretien qui aurait pu être évité ! Nous avons aussi fait cette erreur ! Deux cerisiers haute tige en plein milieu d'une partie du potager. Nous devons maintenant les tailler régulièrement. Nous avons décidé de les « sacrifier » et de leur faire une taille sévère, même si cette espèce n'est pas spécialement adaptée à ce type de conduite. Nous avons pris cette décision car les légumes autour des arbres avaient bien du mal à pousser, on voyait une nette différence avec les végétaux un peu plus éloignés. Une bonne façon de gérer cela en amont est de planter des arbres greffés sur porte-greffe nains à proximité du potager.
    • Les chemins. Vous souhaitez faire de petits passes pieds pour circuler entre les planches ? C'est une bonne idée, mais n'oubliez pas de prévoir un chemin central, assez large, qui permettra d'accéder à la base de chaque planche de culture le jour où vous devrez amener des brouettes de compost, une botte de paille, etc. Quand tout est trop serré, on étouffe ! Et on se complique la vie...
    • La taille des planches. Si nous avions un conseil à vous donner : standardisez la taille de vos planches de cultures. En effet, si toutes vos planches font la même taille, il sera beaucoup plus simple :
      - de gérer les filets anti-insectes
      - de gérer les voiles de forçage si vous en utilisez
      - de gérer l'irrigation. Par exemple sur une planche de 2 m², vous savez que deux arrosoirs de 10L offriront un arrosage de 10 mm, vous pourrez gérer l'installation du goutte-à-goutte sans mesurer chaque planche, etc.
      - de gérer les densités de semis, de plantation, etc.
      Le but de toutes ces actions est de gagner du temps sur toute l'année ! Et du temps gagné, c'est du temps supplémentaire pour réfléchir, observer, contempler, bref : jardiner à notre manière !
    • Un autre exemple, en hiver on accède au potager quasi exclusivement pour récolter. Dès lors, j'installe ma zone de verdure à l'entrée de la serre, et non au fond (elle fait 15 m de long). Cela peut paraître tout bête, mais lors des récoltes quotidiennes je n'ai qu'à rentrer dans la serre et je suis tout de suite en position de récolte, pas besoin de faire 10 m pour aller chercher quelques feuilles de mâches ou de Claytone, surtout que nous en consommons quasiment à tous les repas !
    • Un dernier exemple : nous cherchons, dans une optique d'autonomie en paillage, à produire notre biomasse au plus près des planches de culture. Sur la photo ci-dessous, nous avons repiqué des consoudes (à gauche) au pied d'une planche surélevée avec des tomates. Une fois adultes, ces consoudes produiront la biomasse nécessaire pour pailler la planche en partie. Un petit complément sera sans doute nécessaire, mais on aura alors gagné beaucoup de temps à ne pas déplacer cette biomasse avec une brouette : un simple coup d'opinel ou de machette, et le tour sera joué ! L'entretien sera plus régulier, mais beaucoup moins pénible.

Cette accumulation de gestes et de réflexions, c'est ce que nous appelons les petits riens qui font tout ! Pris individuellement, ces gestes paraissent dérisoires, mais ensemble, permettent de faire gagner de précieuses heures.

Plus généralement, cherchez à créer des synergies entre les différents éléments : vous faites votre potager près de la maison ? Parfait, c'est l'occasion de créer des treilles fixées sur le mur pour faire grimper des plantes, c'est aussi l'occasion de placer une cuve d'eau directement en sortie de gouttière, des jardinières sous la fenêtre de la cuisine que l'on pourra arroser régulièrement avec l'eau de récupération (lavage des légumes, cuisine), etc.

Le but est chaque élément remplisse plusieurs fonctions, et que chaque fonction soit remplie par plusieurs éléments !

Chaque élément plusieurs fonctions...

Un principe très connu en permaculture est celui selon lequel chaque élément doit remplir plusieurs fonctions. Ainsi, les éléments de votre jardin se complètent, fonctionnent ensemble, et sont plus efficaces, plus pertinents.

Cette phrase est à avoir toujours en tête : cherchez à maximiser l'utilité de chaque élément du jardin.

Voici quelques exemples parlant à ce sujet :

- une cuve d'arrosage placée dans la serre permettra de stocker de l'eau, ET de créer une masse thermique qui empêchera la température de trop descendre à ses côtés. Depuis que nous avons fait ça, nous arrivons à garder en vie notre verveine citronnelle qui mourrait tous les hivers et repartait de la base au printemps. Elle est collée à la cuve sur cette photo. On en consomme en frais sur une plus longue période également ! Ici, en mars.

- Un bac a compost dans le potager peut servir à composter rapidement les déchets de culture et à créer un micro climat plus frais au nord pour cultiver des plantes sensibles à la chaleur.

- Une haie bien placée peut faire de l'ombre et produire du paillage, voire réfléchir la lumière du soleil si elle est placée au nord. Elle pourra, de plus, réguler l'humidité à ses côtés. Si elle est faite de plantes fruitières ou médicinales, on aura en plus des récoltes...

- Faites des choix de végétaux pertinents. Par exemple, cultivez des fleurs qui soient à la fois belles et comestibles ! Ou alors, plantez une vigne fruitière pour faire de l'ombre, qui produira en plus des fruits contrairement à une vigne vierge...

- Créer une clôture permet de protéger la zone de production des animaux type sangliers et permet de faire grimper des végétaux dessus...

- Les exemples sont nombreux ! Les idées vous viendront au fur à et mesure dès lors que vous aurez en tête cette façon de penser

... Et chaque fonction remplie par plusieurs éléments !

La récupération d'eau ne pourrait-elle pas être réalisée par le toit de la maison, mais également la serre avec un système de gouttière ? Ne pourrait-on pas également creuser des baissières pour capter l'eau davantage sur le terrain ? (Une baissière est une sorte de fossé peu profond et large, végétalisé, qui recueille provisoirement de l'eau de ruissellement, soit pour l'évacuer via un trop-plein, soit pour l'évaporer ou pour l'infiltrer sur place permettant ainsi la reconstitution des nappes phréatiques)

La production de nourriture peut être assurée par le potager, mais également par le poulailler, le verger, une forêt comestible, un bac d'aquaponie ...

La production de paillage peut être assurée par la haie qui borde le terrain, mais également par la prairie, et pourquoi pas une zone dédiée, comme une consouderaie ou des miscanthus...

De même, ne pourrait-on pas diversifier nos sources d'approvisionnement en matière organique ? L'élagueur du coin qui nous donne son broyat, mais également le centre d'équestre d'à côté, etc. Vous aurez ainsi un plan B au cas où l'une des solutions ne fonctionne plus. Nous reparlerons de tout ça dans le module sur la matière organique.

Le soleil et le potager

La lumière est un paramètre central à prendre en considération pour la croissance d'une plante. L'énergie solaire entre dans le processus de photosynthèse nécessaire à la création de matière. Sans lumière, pas de récolte !

C'est pour cela que l'orientation de votre potager est déterminante pour la réussite de vos cultures.

Chercher la chaleur...

Peu importe le climat dans lequel vous vivez : cherchez à implanter vos zones de cultures sur les emplacements ayant un ensoleillement maximal le long de la journée. Votre potager doit être baigné de soleil, notamment pour assurer une production les mois d'hiver, d'automne et de printemps. Nous allons voir après comment gérer le soleil en été. Essayez également de penser à l'emplacement des futures plantes vivaces. Même avec un petit jardin, il est certain que vous voudrez installer une vigne, des kiwis, ou quelques fruitiers, pour diversifier vos récoltes et produire plus en travaillant moins !

Avant toute chose, vous êtes chanceux !

Avoir le choix peut néanmoins parfois être un casse-tête ! Comme nous l'avons dit plus haut, vous pouvez choisir la zone la plus proche de votre habitation, mais il existe une autre manière de trancher...

Il ne faut pas oublier qu'environ la moitié du temps d'une journée (cela varie selon les saisons), il fait nuit ! L'obscurité peut faire fortement baisser les températures. C'est pourquoi, si vous hésitez entre plusieurs zones, nous vous conseillons d'essayer de comparer les températures nocturnes de ces différentes zones. En effet, sur un terrain, nous pouvons observer des endroits où des poches de froid s'installent durant la nuit. Puisque la mort d'une plante par le froid ne se joue parfois qu'à quelques degrés, il peut être intéressant d'identifier la zone où les températures descendent le moins ! Pour ce faire, vous pouvez vous aider de thermomètres affichant les températures maximum et minimum, mécaniques ou électroniques. Nous vous recommandons les thermomètres mécaniques, plus écologiques et ayant une durée de vie plus longue.

Voici la méthode : installez un thermomètre mini-maxi dans chaque zone candidate à devenir votre potager. L'idéal, si vous avez du temps et de la patience, est de pouvoir relever les températures mini et maxi régulièrement durant plusieurs mois... Bien qu'un peu contraignante, cette activité est très intéressante, permettant d'apprendre à connaître son terrain lorsque celui-ci présente une topologie diversifiée ! Bien entendu, cette étude thermique est facultative !

A titre personnel, pour dénicher certains microclimats sur notre terrain, nous nous sommes aussi aidés... De notre chienne ! Elle adore bronzer au soleil et elle est particulièrement douée pour trouver ces zones en plein soleil et à l'abri du vent. En l'observant, nous avons pu dénicher certains endroits particulièrement chauds et y cultiver des plantes thermophiles.

Aussi, il est possible de se servir des microclimats créés par la maison pour cultiver des plantes : aux pieds des murs, la chaleur est plus intense et moins variable entre le jour et la nuit. Les cultures primeurs y réussissent mieux, notamment si l'on peut y construire un châssis.

On peut également imaginer créer une serre adossée à un mur de la maison, ou encore une véranda... Les solutions sont nombreuses !

Vous pouvez également choisir la zone la moins venteuse, si vous avez le choix !

...Mais protéger de ses excès !

L'ensoleillement est primordial pour les cultures tout au long de l'année... Mais comment faire en été, lorsque la chaleur est écrasante et qu'elle nuit à la santé de nos cultures ?

Créer des zones d'ombre « à la carte »

En été, il est tout à fait possible de créer des zones d'ombre pour protéger nos cultures en plantant à proximité des plantes à hautes parties aériennes comme du sorgho, du maïs ou des haricots par exemple ! Ainsi, les cultures sensibles comme la laitue par exemple, ou encore la mâche et les épinards en fin d'été profitent d'une ombre légère les préservant de la montaison et du stress. On peut également créer des pergolas, et cultiver en dessous.

Cultiver sous les arbres

Il sera très intéressant d'entourer votre potager d'une haie, car les arbres et arbustes régulent la température autour d'eux. Ils permettent de conserver une certaine fraîcheur, et les espèces caduques laissent passer la lumière durant les mois froids.

Si vous vivez dans un climat chaud et que vous possédez des arbres sur votre terrain, vous pourriez peut-être être tenté de cultiver sous vos arbres.

La culture sous les arbres possède autant d'avantages que d'inconvénients !

Cultiver près des arbres (d'essences locales idéalement) présente certains avantages. Les arbres en question, surtout s'ils sont vieux, transmettent des mycorhizes dans le sol (et une certaine « mémoire » du climat et des événements de votre lieu), produisent de la matière organique, créent un microclimat plus humide...

Les mycorhizes sont d'une importance capitale dans la fertilité de votre sol. Elles permettent de dégrader la matière organique et de nourrir vos plantes grâce à leurs hyphes, leurs « racines », bien plus fines que les racines des plantes. Hervé Coves, un agronome français, considère qu'un vieux chêne peut avoir une incidence sur les mycorhizes, même à 500 m de lui.

Définition : « Une mycorhize (du grec myco, « champignon » et rhiza, « racine ») est le résultat de l'association symbiotique, appelée mycorhization, entre des champignons et les racines des plantes. Dans cette association, les hyphes du mycélium d'un champignon colonisent les racines d'une plante. Les hyphes se présentent comme de fins filaments, capables d'explorer un très grand volume de sol (pour un volume égal de biomasse, les filaments mycéliens prospecteront mille fois plus de surface de sol que des racines de plantes !). En l'échange de sucres offerts par la plante, le champignon prospecte le sol et lui offre de précieux nutriments. C'est un échange qui s'avère gagnant-gagnant dans la plupart des cas. »

Néanmoins, il est plus prudent d'éviter d'installer votre potager sous un chêne âgé de 70 ans : les légumes pourraient souffrir de la concurrence racinaire avec le chêne, et le manque de soleil pourrait nuire à vos cultures. C'est pourquoi nous vous conseillons plutôt de cultiver sous des arbres fruitiers basse-tige (qui ne montent pas très haut et dont l'enracinement est plus superficiel). En plus, vous maximiserez votre production en récoltant des fruits !

Ce conseil est marqué de subjectivité : nous avons un sol qui retient très peu l'eau sur notre terrain. Ainsi, cultiver sous des arbres est très difficile ici. Néanmoins, en sol argileux les résultats sont meilleurs. Tout dépend du contexte...!

En conclusion : la culture sous arbres, oui, mais de préférence sous des arbres fruitiers ou des arbustes. Cultivez de préférence au sud des arbres, notamment pour les légumes appréciant la chaleur. Nous aurons ainsi plutôt tendance à penser qu'il vaut mieux pouvoir contrôler l'ombre dans son potager avec des plantes qui poussent en hauteur plutôt que d'être contraint par une ombre trop importante imposée par un grand arbre, notamment pour les saisons en dehors de l'été.

A vous désormais de faire vos expériences et de trancher sur ce point !

Par rapport au potager et aux jardins-forêts : le potager est utile lors de l'implantation d'un jardin-forêt, on cultive alors à la lisière de ce dernier ! Une fois le jardin forêt installé, on pourra réaliser un potager dans les clairières que l'on y aura laissé, ou toujours en lisière.

L'orientation des planches de culture

Pour l'orientation de vos planches de culture, vous avez généralement le choix, sauf si votre terrain est très pentu. Dans ce cas, vous gagnerez à réaliser les planches perpendiculairement à la pente pour éviter les écoulements d'eau. Pour ce faire, on peut avoir recours au niveau égyptien, assez facile à construire.

Avec l'observation, nous avons pu déterminer deux choses :

  • Les planches orientées nord-sud offrent un ensoleillement mieux réparti pour tous les légumes présents, notamment si vous cultivez sur butte.
  • Les planches orientées est-ouest offrent plus de possibilités en termes de microclimats. En effet, on pourra cultiver au sud des légumes dont les parties aériennes sont assez hautes (tomates, mais, haricot...), ou d'autres légumes appréciant la chaleur par exemple. Derrière cette ligne, au nord, des salades par exemple se plairont peut-être davantage en été que si elles avaient été exposées au soleil à l'est ou à l'ouest. Vous verrez avec le temps quelle est la solution la plus adaptée chez vous.

Le vent

Bien qu'ils puissent empêcher certaines maladies, notamment cryptogamiques, dans certains climats particulièrement humides, les vents sont globalement néfastes aux cultures. Le vent assèche le sol, empêche les plantes de respirer convenablement, parfois les casse ou les couche sur le sol...

Si votre terrain est venteux, une solution : la création de haies aux abords du terrain, permettant de filtrer le vent. Une haie bien composée peut filtrer le vent sur une distance d'environ 6 à 8/9 fois sa hauteur. Une haie bien fournie mesurant environ 5 m de hauteur pourra alors filtrer le vent jusqu'à 40 m plus loin !

Si votre terrain est trop grand pour filtrer le vent jusqu'à vos planches de culture, vous pouvez cultiver entre des lignes d'arbres

En créant de petites haies autour de votre potager, vous formerez un cocon protecteur pour vos plantes potagères avec à la clef : augmentation des rendements, économie d'eau, d'énergie, et même de temps ! En effet, sans vents violents, on peut par exemple se permettre ne pas tuteurer certains légumes comme les poivrons ou les aubergines, qui peuvent céder facilement sans tuteur si le jardin est exposé aux rafales.

Pour composer vos haies autour du potager, vous pouvez utiliser des fruitiers greffés sur des porte-greffes basse-tige, des arbustes, ou encore de grandes herbacées vivaces. Il est intéressant de mélanger les espèces à feuilles persistantes et celles à feuilles caduques.

Voici un exemple de composition : quelques Feijoa (fruitier persistant à la floraison magnifique et fructifiant dans la moitié sud de la France), des fusains d'Europe, de la bourdaine, des romarins, de la lavande, des argousiers, des arbousiers, des cornouillers mâles, des topinambours ou encore des arbustes fixateurs d'azote comme des baguenaudiers ou lespédèzes...

Avec ce mélange, vous aurez des floraisons étalées, des récoltes de nourriture et de plantes médicinales, et vous favoriserez l'installation des auxiliaires de culture près de votre potager. Si vous avez le choix, oubliez les haies mono-spécifiques, constituées d'une seule espèce et attirant assez peu d'insectes différents.

En parlant d'insectes, intéressons-nous à un sujet central et passionnant de la création d'un potager en permaculture : la biodiversité !

La biodiversité

Accueillir la biodiversité dans votre potager est une obligation si vous souhaitez vous passer de produits de traitements et voir vos plantes en bonne santé. Vous aurez également le loisir d'observer toutes les interactions entre les insectes, les plantes, les champignons...

C'est un aspect émerveillant d'un jardin, sans doute l'une des choses qui encourage à créer un jardin en permaculture.

Il y a différentes façons d'accueillir la biodiversité sur son potager et son terrain.

À l'échelle du terrain, on pourra facilement laisser des zones sauvages.

La présence de zones sauvages dans le potager permet d'attirer nombre d'auxiliaires des cultures : une invasion de pucerons sur nos plantes potagères ? Des larves de coccinelles, de syrphes, ou autres punaises se feront un plaisir de venir s'en régaler. Un équilibre de l'écosystème se dessine peu à peu. Le jardinier tient un rôle de chef d'orchestre : il guide l'ensemble et effectue des mesures d'ajustement si nécessaire, mais il limite au maximum ses interventions.

Essayez également d'adopter la tonte la plus minimale possible : nous ne tondons plus que des chemins dans la prairie, et nous laissons le reste s'épanouir et monter en graines. Nous fauchons ensuite une à deux fois par an. La fauche va directement sur le sol du potager, pour l'enrichir. Ces zones sauvages devront, si possible, être connectées au reste du terrain : le but est de créer un corridor écologique, afin que la biodiversité puisse circuler facilement sur le terrain.

Si vous vous posez la question, le meilleur moment pour tondre selon nous est en automne : les abeilles ont eu le temps de se restaurer, et les graines sont formées et sont même pour la plupart tombées au sol, le foin alors recueilli est moins riche en graines. La tonte impactera donc moins la biodiversité, même si de nombreux insectes logent tout même dans les tiges de certaines plantes. Malheureusement, le besoin en paillage est souvent très présent en fin de printemps. On peut alors choisir de tondre une partie, et laisser le reste, bref : trouver un compromis qui convienne à tous les habitants du lieu ! Si vous avez une petite surface, tondre la majeure partie de la pelouse n'est pas très grave si l'on prend la peine de laisser quand même quelques zones pour les insectes, tout est question de compromis...

Pour les plus motivés, la fauche des prairies à la faux est la méthode la moins impactante pour la biodiversité.

La tonte minimale permet d'assurer aux insectes et aux animaux de quoi se nourrir et loger. Les prairies sont fleuries, magnifiques, et il est bien plus agréable de se promener dans le jardin ! Alors, vous l'adoptez ?

À l'échelle du potager, il est donc possible de densifier, d'accompagner la biodiversité, d'intervenir pour créer un espace favorable à l'installation des prédateurs naturels des ravageurs de nos cultures que l'on nomme les auxiliaires.

Ainsi, voici un ensemble de conseils que nous vous encourageons à appliquer chez vous :

  • Cultiver des zones spécialement dédiées à la biodiversité en utilisant de nombreuses plantes vivaces connues pour attirer des auxiliaires. L'objectif est d'obtenir différentes floraisons, étalées sur l'année, pour permettre aux nombreux pollinisateurs de se restaurer sur la plus longue période possible. Vous pouvez par exemple créer des zones maigres pour favoriser l'installation de plantes sauvages différentes de celles qui sont présentes habituellement sur le potager. Il s'agit là de retirer la couche de terre végétale et de drainer le sol en creusant de petits fossés tout autour. Un milieu plus aride, plus hostile va alors se créer. Et contrairement à ce que l'on pourrait penser intuitivement, de nombreuses plantes sauvages friandes de ce milieu vont s'y installer, attirant alors une faune et une flore bien spécifiques !
  • Laisser des zones où le sol est à nu, ou au moins créer des buttes de sable ou de terre, afin que certains insectes puissent y loger ! En effet, pour vous donner un exemple, 90% des abeilles sont solitaires. Et parmi ces abeilles, 70% logent dans le sol.
  • Créer des nichoirs, afin d'accueillir les oiseaux.
  • Créer des perchoirs, à défaut d'avoir de grands arbres, pour permettre aux chouettes ou autres buses de chasser les rongeurs.
  • Créer des niches écologiques, comme des hôtels à insectes. Nul besoin de créer de luxueux édifices constitués de dizaines de matériaux différents pour accueillir des insectes (notamment ceux du commerce, peu utiles dans de nombreux cas car mals étudiés, malheureusement...). Vous pouvez vous contenter de faire des tas de pierres, des tas de bois morts, des tas de brindilles, des tas de compost, toutes sortes de tas ! Ils permettront à une multitude d'insectes différents de s'installer. Il est important d'avoir des « patchs » réguliers présents dans le jardin, afin de limiter les déplacements des auxiliaires pour trouver à manger sur nos planches de culture. Une coccinelle adulte peut parcourir plusieurs kilomètres en volant, mais sa larve, elle, ne pourra parcourir que quelques mètres !

Encourager la présence des auxiliaires pour lutter contre les ravageurs s'appelle la lutte biologique par conservation : en offrant le gîte et le couvert aux auxiliaires, ils s'installent de façon pérenne et prennent soin de votre potager ! Néanmoins, il restera toujours des ravageurs... Bienvenue dans la nature !

Il faut commencer par aborder ces ravageurs d'une façon pacifique et ne pas s'obstiner à vouloir intervenir car ce n'est pas toujours nécessaire. Des pucerons sur un rosier ne l'empêcheront pas de fleurir, quelques feuilles grignotées n'empêcheront pas une salade de se développer. Le monde des plantes parfaites n'existe pas. Si vous en doutez, prenez quelques minutes pour observer un écosystème naturel : pourrez-vous trouver une seule plante parfaitement indemne de piqûre/champignon/trou ou autre ?...

Prenez l'habitude de gérer pacifiquement ces ravageurs, en adoptant des méthodes alternatives comme semer 20 à 40% de plus que ce que vous souhaitez récolter pour les légumes régulièrement ravagés. On peut également distraire ces ravageurs : nourrir les limaces avec des semis de crucifères, etc. Nous avons réalisé un article sur les limaces, disponible ici.

N'hésitez pas non plus à opter pour des méthodes de lutte classiques, mais sans produits. Par exemple, le filet anti-insectes est une arme redoutable pour protéger les poireaux ou les choux de leurs ravageurs aériens, comme la mouche du poireau et la piéride. Selon les régions, ils sont presque indispensables...

La mouche de la carotte ne vole pas plus haut qu'un 1,6 m : les maraîchers entourent alors parfois leurs parcelles d'un filet de cette hauteur : les mouches ne peuvent pas passer...!

Enfin, accepter l'échec pour mieux rebondir est une forme de gestion alternative des ravageurs : nous nous sommes refusés à la culture des artichauts, tant les rat-taupiers nous les ont ravagés quatre années de suite. Nous retenterons un jour, et en attendant nous cultivons en plus grande quantité d'autres légumes qui se récoltent à la période des artichauts. Tous les terroirs et les contextes ne conviennent pas pour toutes les cultures ! On ne cultivera pas la tomate de la même manière en Belgique qu'en Provence...! Même chose si vous êtes en altitude : la saison sera courte, la serre peut-être indispensable pour récolter toute l'année...

En dernier recours, vous pouvez utiliser certains produits comme le ferramol, mais pesez vraiment les conséquences de ces produits avant de les utiliser. Le ferramol va tuer des limaces, il empêchera donc en partie leurs prédateurs de se développer. Le savon noir tue les pucerons, mais il empêchera les larves de syrphes et de coccinelles de se nourrir, voire les tuera également. Cela nous est arrivé plusieurs fois... S'en suivent regrets, remords, émotions négatives... Quel dommage !

Il vous appartient de choisir le bon compromis entre impératif de production et gestion naturelle de l'écosystème.

Bref, fermons cette parenthèse et revenons à nos moutons.

Pour la création de niches écologiques, nous pourrions prendre plusieurs exemples, comme ici où nous avons créé une petite pyramide en pierre à droite et une haie sèche : des branches avec des feuilles empilées. Ces deux milieux accueilleront de nombreux insectes et autres petits animaux différents !

N'oubliez pas d'installer des points d'eau dans tout le potager si vous n'avez pas de mare. On pourra les remplir au passage, durant l'été. Nous mettons généralement quelques brindilles au fond, qui dépassent, de sorte que les insectes tombant dedans puissent en sortir.

Au sujet de la biodiversité, nous vous conseillons de visiter le site du réseau Hortus : https://www.hortus-france.org/ .

Le réseau Hortus propose un modèle de jardin en 3 zones dont on peut s'inspirer pour accueillir la biodiversité chez soi. Ce concept est différent du zonage issu de la permaculture (les zones 0 à 5), mais ces deux concepts sont tout à fait complémentaires.

Les effets de lisière

Les lisières, ou écotones, sont des zones de transitions écologiques entre deux écosystèmes différents. Le passage de la forêt à la prairie en est un exemple. Entre une forêt et une prairie, il y a souvent un front pionnier initié par la forêt qui cherche à gagner du terrain.

Dans ce cas, ce front est souvent matérialisé par un roncier. Sur ces lisières, une richesse en biodiversité accrue sera présente : on retrouvera la biodiversité de la forêt, celle de la prairie, mais également la biodiversité spécifique à la lisière forêt/prairie. Cette zone se retrouve alors très riche et très intense en vie. On dit alors que 1+1 = 3 !

Vous pouvez, sur votre terrain, jouer avec ces effets de lisières, en créant des écotones un peu partout. Des mini-haies improvisées, même taillées à 1 m de haut, donneront la possibilité à de nouvelles espèces de s'installer. De petites mares dispersées dans le potager plutôt qu'une grosse marre seront plus efficaces par exemple. En faisant cela, vous créerez de nombreux microclimats, bénéfiques à de nombreux êtres vivants ! Créez des lisières partout sur votre terrain, et vous verrez la biodiversité exploser !

Alors, comment allez-vous organiser votre potager ?

Lors de la conception de votre potager, n'hésitez pas à matérialiser sur votre plan les zones que vous laisserez pour les insectes, à la nature sauvage, et celles destinées à la culture de vos légumes !

Si ce module vous inspire des questions, n'hésitez pas à les poser directement en commentaire !


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